A première vue : la rentrée Actes Sud 2015
À première vue, en 2015, les éditions Actes Sud ne perdront pas le nord (ah ah) grâce à Mathias Enard, dont Boussole devrait aimanter leur rentrée vers la pôle position (voire jusqu’à un prix ?)
Pour le reste, entre ces dames et ces messieurs, il y a du solide, du curieux, de l’original, du moins séduisant – et le plus gros événement médiatique de la rentrée, pas forcément pour les meilleures raisons… (Rendez-vous en fin d’article pour découvrir de quoi il s’agit !)
UN PEU PLUS À L’OUEST : Boussole, de Mathias Enard
A travers les réflexions et souvenirs fiévreux d’un homme frappé d’insomnie le temps d’une nuit, Enard revisite l’histoire des relations entre Orient et Occident. Tout simplement ! Un voyage érudit, sans doute puissamment littéraire connaissant l’auteur, fruit d’un long travail, qui devrait marquer la rentrée et semble un candidat sérieux à un prix (pour autant qu’un prix ait l’ambition cette année de couronner une véritable œuvre).
ÉCRAN CREVÉ : Notre désir est sans remède, de Mathieu Larnaudie
Grandeur et décadence à Hollywood d’une actrice trop belle, trop libre pour ne pas déranger les bonnes consciences : à travers le portrait de Frances Farmer, star déchue du cinéma américain dans les années 30, Larnaudie interroge la perversion de la célébrité et du poids de l’image.
RETOUR DU FRONT : Otages intimes, de Jeanne Benameur
Enfin libéré après avoir longuement été retenu en otage, un photographe de guerre revient chez lui, dans le village de sa jeunesse, pour se remettre et affronter, sereinement si possible, les souvenirs du chaos qu’il a vécu. Un parcours qu’il accomplit auprès de deux amis d’enfance, tous trois cherchant à comprendre ce qui nous rend tous plus ou moins otages de moments de notre vie.
CORPS SAUVAGES : Crash-Test, de Claro
Trois personnages sont à la croisée d’une réflexion poétique sur le corps et la violence : un homme chargé de réaliser des crash-tests avec des cadavres, une strip-teaseuse exposée chaque soir aux regards incandescents des hommes, un adolescent s’adonnant au sexe solitaire dans sa chambre avec des bandes dessinées pour adultes. Sur le papier, quelque chose du Crash de J.G. Ballard, bien sûr, mais avec Claro, il ne faut pas s’attendre à un simple décalque.
THOMAS MORE RELOADED : Ah ! Ca ira…, de Denis Lachaud
Avec ce gros roman (432 pages), Lachaud esquisse une utopie politique, dans laquelle la révolte contre les dérives de la société passe, non plus par la violence, mais par le passage à l’acte citoyen. Au cœur du livre, un père et sa fille. Le premier, en 2016, accomplit un geste qui l’envoie en prison. En 2037, lorsqu’il recouvre la liberté, c’est sa fille qui prend la relève et mène le combat à sa manière, dans un mouvement visant à rejeter la démocratie telle que nous la subissons.
À LA CLAIRE FONTAINE : La Source, d’Anne-Marie Garat
Dans un domaine reculé de Franche-Comté, une vieille femme raconte à la narratrice qu’elle accueille pour quelques jours l’histoire de la maison et de ses habitants. Mais ses récits sont-ils véridiques, ou tisse-t-elle la toile d’une étrange fiction ? Et que vient chercher ici la narratrice, dont le passé familial recèle de sombres secrets ? Un gros roman romanesque comme les aime Anne-Marie Garat.
SIM CITY : Bâtisseurs de l’oubli, de Nathalie Démoulin
Dans la région de Sète, l’architecte Marc Barca s’est échiné durant des années à repenser le paysage urbain, confrontant ses rêves de béton aux vestiges romains antiques qui émergent régulièrement de la terre. Face à lui, la Méditerranée, personnage à part entière du roman.
*****
Côté étrangers, nous avons un peu de mal à délimiter les contours du programme pour le moment, aussi nous concentrerons-nous sur deux titres en particulier, ce qui sera déjà pas mal…
MENTEUR MENTEUR : L’Imposteur, de Javier Cercas
(traduit de l’espagnol par Aleksandar Grujicic)
Le gros morceau de la rentrée étrangère chez Actes Sud, c’est lui. Et ce roman évoquant le dévoilement de la supercherie d’un nonagénaire barcelonais, porte-parole des survivants espagnols de l’Holocauste pendant des années, qui s’avère n’avoir jamais connu lui-même l’horreur des camps contrairement à ce qu’il prétendait, ne manquera pas de faire parler. D’après les premiers retours, en (très) bien !
AU REVOIR LES ENFANTS : & fils, de David Gilbert
(traduit de l’américain par Clément Baude)
Décidément, ces dernières années, l’écrivain culte est à la mode dans les romans. Après notamment Joël Dicker (La Vérité sur l’affaire Harry Quebert) et cette année Alice Zeniter (Juste avant l’oubli), voici l’Américain David Gilbert, qui raconte les tentatives du dit écrivain pour renouer avec ses fils.
*****
Et enfin, nous l’annoncions en préambule, LE titre médiatique de la rentrée, le rouleau compresseur qui va faire saigner les stylos des critiques et s’énerver fans et détracteurs à partir du 26 août :
LA SUITE QUI N’AURAIT JAMAIS DÛ ÊTRE ÉCRITE : Millénium 4 – Ce qui ne me tue pas, de David Lagercrantz
(traduit du suédois par Hege Roel Rousson)
Tout a été et sera encore dit au sujet de ce roman, résumons donc le plus possible : un aimable (et ma foi courageux) faiseur, auteur notamment de l’autobiographie de Zlatan Ibrahimovic (si si), a été mandaté pour écrire la suite de la trilogie mythique de Stieg Larsson, interrompue pour cause de décès prématuré de ce dernier. Lagercrantz a ainsi la lourde tâche de ressusciter Mikael Blomkvist et Lisbeth Salander, dans une nouvelle enquête sur un complot impliquant les services secrets américains. On tâchera de juger la bête avec autant d’objectivité que possible…
Cette entrée a été publiée le 19 juillet 2015 par cannibaleslecteurs. Classé dans A première vue, Polars, Romans Etrangers, Romans Francophones et a été tagué 2015, Actes Sud, Anne-Marie Garat, architecte, au revoir, bandes dessinées, Barcelone, bâtisseurs, Benameur, Boussole, camps, citoyen, Claro, crash-test, David Gilbert, David Lagercrantz, désir, Denis Lachaud, fils, Frances Farmer, Franche-Comté, guerre, Hollywood, Holocauste, imposteur, intimes, Javier Cercas, Jeanne Benameur, Larnaudie, limite, Lisbeth Salander, littéraire, Mathias Enard, Mathieu Larnaudie, Mikael Blomkvist, Millénium 4, Millenium, Nathalie Démoulin, nazis, occcident, orient, otages, oubli, photographe, rentrée, rescapés, sans, Sète, sexe, Shoah, source, survivants.
Tout ça pour nous !! Bon, faudra que je planque ma CB dans un pot de fleur pour ne pas succomber ! :D
20 juillet 2015 à 08:49
Evite la plante carnivore, on ne sait jamais :P
20 juillet 2015 à 10:21
Plus sûr pour la CB ! Involable, irrécupérable… mdr
20 juillet 2015 à 21:14
MERCI les amis pour cette séance de rattrapage (en arrêt maladie depuis longtemps à cause d’un problème de rien du tout qui m’empêchait de rester debout, je reprends en septembre et j’étais un poil angoissée à l’idée de n’avoir aucune idée de ce qui allait débouler sur nos tables)… Longue vie à vous, chers Cannibales !
20 juillet 2015 à 18:13
Oui, j’ai su que tu étais arrêtée longuement, en effet… J’espère que ça va mieux, que tu peux profiter un peu de l’été et que tu seras d’attaque pour affronter cette drôle de rentrée – où il n’y a pas forcément de « monstres », mais beaucoup de choses intéressantes.
Nous allons continuer à dérouler pas mal d’autres maisons, reste donc connectée pour compléter tes connaissances ;-)
Bon rétablissement, des bises !
D.
20 juillet 2015 à 19:50
J’ai fini le Lachaud, et il fait bien plaisir. Une anticipation plutôt réaliste, et un bel hommage à la nouvelle génération d’indignés
30 juillet 2015 à 11:25
Merci pour ce premier avis ! :)
1 août 2015 à 07:37
Et le Claro est assez inégal. De beaux moments, notamment quand le récit se penche sur le personnage de la strip-teaseuse, mais un poil prétentieux. Les jeux sur la mise-en-page, qui m’avaient intéressés à première vue, sont un peu ratés, à mon avis.
5 août 2015 à 21:42
Bon, voilà un avis qui ne me surprend pas, je l’avoue… Claro est un type brillant, mais en général, je n’accroche pas à son travail (hormis son blog, parfois).
Merci à nouveau pour ce coup d’œil, en tout cas !
12 août 2015 à 10:11