Continuer, de Laurent Mauvignier
Signé Bookfalo Kill
Une mère et son fils chevauchent à travers les plaines et les montagnes du Kirghizistan. S’ils en sont là, à braver les voleurs de chevaux, à dormir sous la tente ou chez l’habitant, à découvrir les paysages hallucinants d’un pays sauvage et méconnu, c’est parce que Sybille a décidé de sauver son enfant. A dix-sept ans, Samuel est sur la mauvaise pente, dépassant allègrement les limites connues de la rébellion adolescente. Il fallait réagir, et comme Sybille ne comptait pas sur Benoît, son ex-mari dont le seul principe éducatif consiste à cultiver une complicité virile assez lourdingue avec son fils, elle a décidé de contraindre Samuel à un voyage aussi rude qu’inattendu.
Un parcours initiatique, à deux, qui pourrait également constituer une opération de sauvetage pour Sybille, elle à qui tout souriait dans sa jeunesse et pour qui tout s’est écroulé du jour au lendemain…
Laurent Mauvignier a pour principe de n’être jamais là où on pourrait l’attendre. D’où cette histoire de périple à cheval, tête-à-tête houleux entre une mère blessée et son adolescent écorché vif, qui joue la carte du dépouillement pour mieux tenter de toucher à l’os des sentiments et de la vérité des personnages.
Articulé en trois parties – « Décider », « Peindre un cheval mort » et « Continuer » -, Continuer est marqué par une montée en puissance assez spectaculaire. Au début, je l’avoue, une fois intégré le dépaysement offert par les paysages et les habitants du Kirghizistan, j’ai craint de trouver anodines les aventures assez peu épiques de Sybille et Samuel, la mise en place des personnages flirtant avec des clichés bon marché, peu dignes de la réputation du romancier.
Et puis, petit à petit, la sensibilité fait son nid – sans sensiblerie. Le style de Mauvignier, si l’on retrouve son art des phrases longues et rythmées par de nombreuses virgules, s’affine et s’épure néanmoins, traquant l’essentiel au détour de réflexions tortueuses qui épousent le cours troublé des pensées des protagonistes. Ceux-ci, plutôt antipathiques (tristement humains ?) au départ, révèlent alors peu à peu leur complexité, les motifs de leurs errances, alors même que les circonstances de plus en plus épiques de leur voyage les forcent à évoluer.
À vrai dire, j’ai eu le sentiment que le roman basculait à mi-parcours (il faut donc être un peu patient), lors d’une scène spectaculaire d’embourbement des chevaux – moment de bravoure littéraire absolument admirable. Obligés de recourir à toutes leurs ressources pour se sortir de ce piège, Sybille et Samuel semblent accomplir avec une violence vitale le premier geste qui leur permettra à terme de s’extirper de leurs vies en plein ratage. Comme une renaissance, arrachée symboliquement de la boue et des souffrances les plus extrêmes, qui projette le livre vers l’avant avec une énergie neuve et belle.
Cette avancée doit beaucoup au merveilleux personnage de Sybille, si désolante au début, si peu armée pour un tel combat, mais qui s’échine à poursuivre sa quête de rédemption familiale avec un entêtement maladroit forçant le respect. Un superbe personnage féminin à qui son auteur masculin ne fait pas de cadeaux, sans doute parce qu’il la comprend mieux que personne.
Dépaysant, taillé dans une matière littéraire brute, Continuer caresse au plus près les mystères d’une nature sauvage et de caractères qui ne le sont pas moins, pour en retirer la vérité la plus pure. Fort et exigeant, c’est l’un des beaux romans de cette rentrée.
Continuer, de Laurent Mauvignier
Éditions de Minuit, 2016
ISBN 978-2-0732-983-7
240 p., 17€
Pourquoi je n’ai pas dépassé la page 50 : Riquet à la houppe, d’Amélie Nothomb
Signé Bookfalo Kill
Vous le savez, j’ai souvent fait preuve d’une certaine indulgence à l’égard d’Amélie Nothomb sur ce blog. Indulgence coupable, me direz-vous peut-être, et je ne pourrais vous en vouloir ; mais c’est ainsi, l’excentrique romancière belge me fascine depuis longtemps et m’amuse assez souvent pour que je lui passe ses mauvaises manies.
Il faut néanmoins savoir lever le pied sur la complaisance et se montrer parfois plus rude – ou plus objectif. Vous l’aurez compris, ce sera le cas cette année, avec cet opus dont je n’ai vraiment pas pu dépasser la page 50 tant la perspective d’une purge se dessinait au fil des premiers chapitres. N’ayant pas de temps à perdre, j’ai préféré couper court.
Qu’est-ce qui cloche dans ce Riquet à la houppe ? Bon, déjà, le fait qu’Amélie Nothomb s’inspire à nouveau d’un texte préexistant pour pondre son roman. Elle avait déjà adapté un conte en 2012 (Barbe Bleue) et un roman d’Oscar Wilde l’année dernière (Le Crime du Comte Neville). En panne d’inspiration ? Étant donné le résultat, la réponse est oui, sans aucun doute.
En effet, non contente de pomper les intrigues des autres pour structurer sa propre histoire, voici que la romancière belge se plagie elle-même. Dès le début de ces cinquante premières pages, j’ai eu le sentiment désagréable de relire sans le vouloir certains de ses livres précédents – en particulier Attentat. Riquet à la houppe s’ouvre en dressant les portraits croisés de Déodat, jeune garçon dont la laideur repoussante est compensée par une intelligence exceptionnelle, et de Trémière, jeune fille au physique aussi délicieux que son esprit est limité. Leur rencontre est bien sûr inévitable…
Bon, que Nothomb ressasse depuis longtemps les mêmes thématiques, ce n’est pas un scoop. Mais qu’elle le fasse d’une manière aussi désinvolte et dénuée d’inspiration, c’est insupportable. Honnêtement, j’imagine que quelqu’un découvrant son œuvre par ce roman pourrait peut-être y trouver de l’intérêt et y prendre du plaisir. Et encore… Car le rythme est poussif, les situations convenues et les personnages finalement superficiels derrière leurs caractères extrêmes. On est loin de la sincérité avec laquelle Amélie Nothomb campait des personnages au-delà des limites dans ses premiers romans ; encore une fois, la romancière déroule sa recette avec les mêmes ingrédients, sans génie ni folie.
Résultat : je me suis ennuyé. Et je suis vite passé à autre chose – en songeant que, de toute façon, je ne passais pas à côté d’une pépite de la rentrée littéraire. Mais en étant bien triste de constater une fois de plus quel gâchis de talent représentait la carrière d’Amélie Nothomb.
Riquet à la houppe, d’Amélie Nothomb
Éditions Albin Michel, 2016
ISBN 978-2-226-32877-9
198 p., 16,90€
Minnow, de James E. McTeer II
Signé Bookfalo Kill
Ce devait être une course toute simple : aller en ville et acheter chez le pharmacien un médicament pour soigner son père. Rien d’insurmontable pour un jeune garçon aussi débrouillard que Minnow. Malheureusement, le produit manque chez le l’apothicaire, qui oriente l’enfant vers le « Docteur Crow », un médecin vaudou consultant dans une modeste cabane de Port Royal, la ville voisine de sinistre réputation.
Ce n’est que le début de longues et périlleuses aventures pour Minnow, qui devra affronter des hommes retors, des créatures dangereuses et la menace d’un terrible ouragan…
Dès les premières pages, très accrocheuses, on se demande dans quel drôle de monde nous entraîne James E. McTeer II. Minnow ressemble à un gamin d’aujourd’hui, mais les paysages et le ton général du récit laissent penser que l’histoire se déroule il y a longtemps, quelque part entre le XIXème et le XXème siècle. Au fond, d’ailleurs, qu’importe. Collé aux basques de ce très chouette gamin qu’est Minnow, on est très vite embarqué dans des aventures palpitantes, au rythme enlevé d’un récit initiatique dans les règles de l’art.
Avec son évocation du sud américain ancestral, Minnow a des airs de roman de Mark Twain, tout en tendant très vite vers le conte, empruntant à ce genre très codifié ses passages obligés : un jeune héros confronté à une perturbation majeure de son équilibre initial, un but à atteindre, des épreuves à affronter, des apprentissages à appliquer pour survivre et rallier son objectif, des adversaires et des personnages auxiliaires qui viennent en aide au héros…
Le mélange des deux genres (roman du sud et conte) donne un très beau récit métis, palpitant, mystérieux, parfois très sombre ; le roman tend vers la violence, celle des hommes répondant à celle de la nature lorsque l’ouragan se déchaîne – passages hallucinants de puissance et de terrible beauté -, mais toujours l’humanité rayonnante de Minnow prend le dessus, inscrivant ce petit bout d’homme formidablement courageux au panthéon des personnages inoubliables.
Il se dégage de ce premier roman très réussi une force d’attraction envoûtante, une magie noire dont les volutes vénéneuses ensorcellent. L’une des gestes littéraires les plus originales de cette rentrée, pour ceux que les sentiers rebattus ennuient. Superbe !
Minnow, de James E. McTeer II
(Minnow, traduit de l’américain par Virginie Buhl)
Éditions du Sous-Sol, 2016
ISBN 978-2-36468-099-9
236 p., 19€
L’Installation de la peur, de Rui Zink
Signé Bookfalo Kill
Coups de sonnette insistants à la porte. Surprise dans le plus simple appareil, la femme qui se trouve dans l’appartement enjoint son enfant de se cacher dans la salle de bains, enfile en hâte une robe de chambre, puis va ouvrir. Sur le seuil, deux hommes, l’un en costume, l’autre en bleu de travail. Ils annoncent que, conformément aux directives du gouvernement, ils viennent procéder à l’installation de la peur.
Bien obligée de les laisser entrer, la femme doit alors subir un processus effarant, durant lequel les deux hommes dressent le tableau effroyable des maux de notre temps. De quoi trembler, en effet… mais la peur n’a-t-elle pas toujours des visages inattendus ?
C’est l’histoire d’une bonne idée, hélas pas totalement aboutie à mon goût. D’un style sec et précis, sans fioriture, Rui Zink campe rapidement le décor de ce qui sera un huis clos à vocation anxiogène. Une femme sans défense, un enfant caché et deux hommes, l’un brillant, l’autre au physique de brute. Et un sujet : la peur. Sous toutes ses formes, puisqu’il va autant être question de peurs intimes (la peur de l’atteinte physique, du viol par exemple) que de terreurs plus vastes, celles qui, selon l’auteur, régissent nos existences : les marchés, le capitalisme, le terrorisme, les virus mondiaux…
L’idée est bonne, donc ; le résultat un peu moins, car le huis clos très statique conçu par Rui Zink impose au texte une abondance de dialogues qui finissent par rendre le roman beaucoup trop bavard. Si le numéro de duettistes des deux hommes s’avère amusant au début, et le propos intéressant, le processus ne se renouvelant pas lasse rapidement. Cela ferait à coup sûr une excellente pièce de théâtre – et encore, en élaguant un peu ; à lire sous forme romanesque, c’est assez vite fastidieux.
L’Installation de la peur est donc hélas plus assommant qu’effrayant… Heureusement, une excellente fin surgit par surprise, entraînant l’intrigue dans une direction inattendue qui permet de se dire qu’on a été récompensé de tenir jusqu’au bout.
En résumé, un petit conseil : voici un texte dont on peut se contenter de lire les soixante premières pages et les trente dernières pour en apprécier l’intelligence. Vous aurez ainsi le sel d’un roman original et pertinent, et gagné un peu de temps pour lire d’autres livres !
L’Installation de la peur, de Rui Zink
(A Instalaçao do medo, traduit du portugais par Maïra Muchnik)
Éditions Agullo, 2016
ISBN 979-10-95718-06-2
176 p., 17,50€
Comme si j’étais seul, de Marco Magini
Signé Bookfalo Kill
Face à l’horreur absolue, on est tout seul, à la fois responsable et victime de ses choix et de ses actes. C’est en substance le message que fait passer le terrible roman de Marco Magini, et que je vous encourage à découvrir en dépit de sa couverture peu gracieuse (et je suis poli).
À tour de rôle, deux hommes prennent la parole. Le premier, Dirk, est un Casque Bleu néerlandais, soldat de la force d’interposition de l’ONU envoyée en Yougoslavie, dans les années 90, alors que la guerre déchire le pays avec une violence inouïe. Le second, Drazen, devrait être un exemple de multiculturalisme : né en Bosnie de parents croates, il finit par s’engager dans l’armée serbe, non pas parce qu’il brûle de prendre les armes, mais parce que c’est le seul moyen de mettre à l’abri du besoin sa femme et sa petite fille. Son choix va l’emmener beaucoup plus loin qu’il ne l’imaginait, dans des confins de terreur inconcevables pour un humain normalement constitué.
Entrant en scène à quelques années de distance, un troisième personnage tente de percevoir ce qui s’est passé en ex-Yougoslavie avec recul et hauteur. Romeo Gonzalez vient d’être nommé au Tribunal International de La Haye, chargé de juger les crimes de guerre et contre l’humanité ; son premier cas, un jeune homme accusé d’avoir abattu des dizaines de personnes durant le massacre de Srebrenica, lui semble de prime abord peu glorieux. Il va pourtant le confronter de plein fouet à l’absurdité et à la cruauté aveugle de la guerre et, au-delà, au problème quasi insoluble qui consiste à juger un individu alors que l’horreur naît d’une addition de déviances, d’errements et de faiblesses qu’un homme seul ne saurait assumer.
Pour son premier roman, l’Italien Marco Magini frappe fort et fait très mal. Ses choix narratifs sont d’une efficacité remarquable : en donnant une voix à Dirk et Drazen, engagés pleinement dans le conflit, il nous plonge au cœur de la tempête guerrière, avec une sobriété et une dignité qui compensent l’épouvante des actes relatés ici (véridiques, d’ailleurs Drazen Erdemovic existe bel et bien). C’est avec un réalisme confondant que le romancier nous donne à voir le terrifiant épisode du massacre de Srebrenica, dont le nom seul convoque un cortège d’effroi pour ceux qui ont vécu cette période de notre histoire récente. Certains passages sont effroyables, mais en gardant toujours la bonne distance, Magini éloigne toute violence gratuite, toute complaisance, avec une maîtrise qu’il convient de saluer car elle rend le livre supportable.
D’un autre côté, le fait d’aborder les chapitres consacrés à Romeo Gonzalez par le biais d’un narrateur omniscient montre bien à quel point le magistrat est dépassé par l’événement qu’on lui demande de juger, pour ainsi dire rendu muet d’horreur et d’impuissance. Il reste à l’extérieur des faits, spectateur désarmé de la guerre autrement plus dérisoire – guerre d’influence, de pouvoir, d’orgueil – qui oppose ses propres collègues.
Car Comme si j’étais seul dresse également un réquisitoire impitoyable contre l’inefficacité coupable de la « communauté internationale » lorsqu’il s’agit d’intervenir dans un conflit majeur. A travers le personnage de Dirk, on assiste avec consternation à l’impuissance des Casques Bleus, interdits d’agir ou de riposter – même lorsqu’ils sont directement menacés – parce que leur chaîne de commandement est incapable de prendre une décision. Quant au juge Gonzalez, il pointe du doigt la faiblesse du tribunal de La Haye, sclérosé par un manque de reconnaissance, dépassé par l’ampleur de sa tâche et par les questions quasi philosophiques qui surpassent sa seule mission de jugement.
Vivre dans un pays en guerre aujourd’hui, c’est être abandonné, raconte Marco Magini. Un constat clairvoyant et cruel qui se perpétue depuis la guerre en Yougoslavie avec une constance désolante, dans de nombreux pays du globe, comme si aucune leçon n’était jamais apprise et alors même que le monde est plus connecté que jamais. Roman dur, éprouvant, Comme si j’étais seul offre une réflexion nécessaire sur ces problématiques qui nous dévorent. Un superbe début.
Comme si j’étais seul, de Marco Magini
(Come fossi solo, traduit de l’italien par Chantal Moiroud)
HC éditions, 2016
ISBN 978-2-35720-258-0
188 p., 19€
Madeleine Project de Clara Beaudoux
En voilà une idée qu’elle est séduisante! Une jeune femme emménage dans son appartement parisien. Elle y découvre une cave fermée par un cadenas. Le propriétaire a perdu la clé. Elle fracture la porte et entre dans la caverne d’Ali Baba. Un fatras de valises, de cartons et autres s’amoncellent dans cette petite pièce. La jeune femme commence à ouvrir des cartons. Et découvre que tous ces objets appartiennent à Madeleine, l’ancienne locataire de l’appartement, décédée il y a deux ans.
Qui était Madeleine? Quelle âge aurait-elle eu? Quelle a été sa vie? Clara Beaudoux enquête, fouille les cartons, lit les lettres, part à la recherche des personnes qui ont connues Madeleine.
La jeune femme en a fait le récit sur son compte Twitter et voilà que les Éditions du Sous-Sol (drôle de coïncidence!) publient cette histoire. Enfin, histoire, c’est un bien grand mot. Car le livre est un condensé de capture d’écran (pour les images postées) du compte Twitter de la jeune femme.
C’est assez particulier comme mode opératoire pour un éditeur, mais pourquoi pas. Après tout, il faut vivre avec son temps et Clara Beaudoux a commencé par rédiger son récit sur la plateforme de réseau social. Lui demander de réécrire le tout aurait dénaturé l’ensemble et l’histoire aurait perdu de son inventivité et de sa spontanéité.
Reste que Madeleine Project tient du documentaire, ce qui est mentionné sur la couverture (tiens, c’est vrai, pourquoi ne pas en avoir faire un documentaire vidéo, avec présentation des objets de Madeleine, interviews des personnes qui se souviennent d’elle, etc…?). Il y a eu deux saisons selon les dires de Clara Beaudoux (comprenez, 2 sessions d’immersions intensives dans la cave) mais c’est trop peu à mon goût. J’espère que la jeune femme va écrire véritablement l’histoire de cette rencontre improbable qui permet à Madeleine de revivre à travers Clara et qui, immanquablement, aurait fait sourire la vieille dame, comme elle nous fait sourire aujourd’hui.
Madeleine Project de Clara Beaudoux
Éditions du Sous-Sol – 2016
9782364682092
284p., 18€
Un article de Clarice Darling.
Watership Down, de Richard Adams
Signé Bookfalo Kill
Pressentant qu’une catastrophe est sur le point de s’abattre sur leur résidence, Fyveer convainc son frère Hazel de fuir et de partir à la recherche d’un nouvel endroit pour vivre. Escorté par une poignée de compagnons déterminés, ils découvrent de nouveaux mondes, se battent avec courage, affrontent les éléments et de nombreux ennemis, jusqu’à élire domicile à Watership Down. Mais leur installation dans ce lieu idyllique signifie-t-elle pour autant la fin de leurs aventures ? Rien n’est moins sûr, car le danger est partout et peut prendre les formes les plus inattendues…
Pour une raison difficile à comprendre, Richard Adams est un auteur totalement méconnu en France, alors qu’il est extrêmement célèbre dans les pays anglo-saxons, où Watership Down, son premier roman paru en 1972, fait partie des classiques que tous les lecteurs, jeunes et moins jeunes, finissent par lire un jour. Serait-ce parce que nous sommes foncièrement rétifs à la fantaisie et à l’imaginaire, trop perclus de rationalité pour nous émerveiller devant la magie d’une histoire aussi simple que palpitante ?
Serait-ce, tout simplement, parce que les héros de Watership Down sont des lapins ?
Ah oui, ça y est, le mot est lancé ! « Lapins », c’est ça, c’est le mot « lapins » qui vous turlupine ? Hé oui, Hazel, Fyveer, Bigwig, leurs compagnons et leurs ennemis sont tous des lapins. De garenne, par-dessus le marché. Et vous voulez que je vous dise ?
On s’en fiche complètement.
Nourri de littérature classique, et bien qu’il s’en défende encore aujourd’hui, Richard Adams a clairement conçu Watership Down comme une variation sur quelques solides références, parmi lesquelles L’Odyssée d’Homère et L’Enéide de Virgile. Oui, rien de moins. Son roman est une épopée prodigieuse, une suite d’aventures édifiantes où leurs héros font preuve de bravoure ou de lâcheté, de loyauté ou de faiblesse, à la poursuite exclusive de leur rêve : trouver le meilleur endroit pour vivre. Et le fait que ce soit des lapins ne change rien à l’affaire. Au contraire, on vibre d’autant plus que Richard Adams, documenté avec le plus grand sérieux sur la question, nous place avec réalisme à la hauteur de ses personnages, nous faisant partager leur hantise à l’idée de traverser une rivière, goûter au plaisir de farfaler à la tombée du jour, trembler dans l’ombre d’un prédateur volant. Et on est sfar quand l’angoisse nous cloue aux pages, avide de savoir comment nos héros vont s’en sortir (ou pas).
Par quel miracle le romancier britannique a-t-il réussi un tel prodige ? De la même manière, sans doute, que Walt Disney a su nous captiver en nous racontant l’histoire de Bambi ou en transformant Robin des Bois en renard : en supposant que l’apparence n’était qu’affaire de préjugés, et qu’il était parfois plus facile de parler de notre humanité en adoptant d’autres oripeaux qu’humains.
Palpitant, généreux, écrit avec une délicatesse et une poésie qui saisissent les plus beaux moments d’une journée dans la nature comme les plus fins des sentiments, animé d’un suspense constant, Watership Down est effectivement un grand roman, où il est question – mine de rien mais avec beaucoup d’acuité – de croyances, de fidélité, d’amitié ou de totalitarisme.
On espère que le pari de Monsieur Toussaint Louverture (éditeur dont le soin apporté aux rares livres qu’il publie est à saluer) de donner une nouvelle vie à cette œuvre, sera relevé par de nombreux lecteurs français. En tout cas, si vous aimez les belles histoires, les romans d’aventure captivants, les contes qui font appel à ce qu’il y a de plus ancestral en nous ; s’il vous reste un peu de nostalgie de ces moments d’enfance où, blotti sous la couette comme dans un terrier chaud et confortable, vous vous immergiez au plus profond d’un livre en oubliant tout le reste, alors Watership Down est incontestablement fait pour vous. Et au diable la raison, être sérieux est d’un ennui !
Watership Down, de Richard Adams
(Watership Down, traduit de l’anglais par Pierre Clinquart, traduction revue par Monsieur Toussaint Louverture)
Éditions Monsieur Toussaint Louverture, 2016
ISBN 979-10-90724-27-3
544 p., 21,90€
Mauvais coûts, de Jacky Schwartzmann
Signé Bookfalo Kill
Globalement, on peut dire de Gaby Aspinall que c’est un salopard. Vous pouvez y aller, il ne s’en offusquera pas – d’ailleurs, il est le premier à l’admettre. Acheteur dans une multinationale déshumanisée (pléonasme), il a pour mission d’écraser les faibles, de les pressurer jusqu’au point de rupture, ce qu’il fait sans aucun état d’âme. A part culbuter l’inaccessible Itsuka, sa n+1 – une garce séduisante comme on n’en fait plus -, il n’a aucun désir particulier, si ce n’est de nourrir sa haine quotidienne contre, en vrac, le rugby, Nespresso, les syndicats ou Alain Souchon.
Enfin, ce n’est pas parce qu’on est une crevure professionnelle qu’on est totalement insensible. Confronté à la mort de son père, au surgissement dans sa vie d’une adolescente affirmant être sa fille et à la perspective d’un rachat de sa boîte par les Américains, Gaby va sans doute être obligé de revoir ses priorités…
Pas facile de résumer ce roman à l’intrigue fuyante ! Ce que j’ai fait laborieusement ci-dessus, tout en ayant conscience que l’essence de Mauvais coûts n’est pas tant dans son histoire (même si elle est prenante et parfaitement menée) que dans ses personnages, ses situations et surtout, surtout, son écriture. Jacky Schwartzmann, dont c’est le troisième livre mais le premier publié par les excellentes éditions lyonnaises de la Fosse aux Ours, déroule en effet un style réjouissant, pétillant d’un humour impitoyable et d’un cynisme frappé au coin du bon sens. Une sorte d’Audiard sous acide, puissamment énervé, en somme.
Les exemples sont si nombreux dans le roman qu’on voudrait le citer en entier (alors qu’il vous suffit de l’acheter, si c’est pas bien foutu quand même) ; mais allez, pour le plaisir, un petit extrait choisi au hasard, immergeant un Gaby en grande forme dans une réunion syndicale :
« Pour la première fois de ma vie, je me suis retrouvé dans la même pièce que des blaireaux d’une cinquantaine d’années avec des pulls en laine. Pas que. Y avait aussi des jeunes cons, mais avec le même orthodontiste : dents longues. (…) Une ambiance procès : si t’es pas d’accord sur un truc, t’es un putain de capitaliste qui mange des enfants crus. (…) Si un jour quelqu’un avait voulu monter une Radio Connard, il aurait posé des micros dans cette salle. »
« Houellebecq revisité par Iain Levison », avance l’éditeur sur la quatrième de couverture : ma foi, même si ce genre de comparaison m’horripile en général, il faut reconnaître qu’ici, c’est très bien résumé. De Houellebecq, Schwartzmann recycle la vision implacable de la société, y ajoutant la verve désespérée et réjouissante de Levison pour faire passer la pilule.
Le résultat est un cocktail à haute tension, violemment drôle, politiquement incorrect au dernier degré, et pourtant capable d’une belle humanité au détour de pages d’autant plus saisissantes qu’elles sont inattendues. La scène où Gaby retourne chez son père après la mort de ce dernier est ainsi poignante – à l’image de tous ces moments dans le roman où Schwartzmann souligne l’atroce solitude qui est le lot de tous ses personnages ; cette « ultra moderne solitude » chère à, tiens donc, Alain Souchon.
Bref, si vous voulez briller dans les salons de polar de cet automne et éviter de répondre Mary Higgins Clark quand on vous demandera votre dernier coup de cœur, lisez Mauvais coûts de Jacky Schwartzmann. Dans notre belle société capitaliste où on passe notre temps à acheter n’importe quoi, ça vous fera au moins une dépense, si ce n’est utile, au moins revigorante. Et, bordel, ça fait du bien par les temps qui courent !
Mauvais coûts, de Jacky Schwartzmann
Éditions la Fosse aux Ours, 2016
ISBN 978-2-35707-091-2
197 p., 17€
L’affaire Arnolfini de Jean-Philippe Postel
Avec mes études d’histoire de l’art, je pensais savoir pas mal de choses sur ce tableau. Petite présomptueuse…
Les époux Arnolfini (du moins est-ce le nom qui lui est donné) est une huile sur bois peinte par Jan van Eyck. Actuellement conservé à la National Gallery à Londres, elle a fasciné des générations de badauds, d’artistes et d’historiens de l’art, et pour cause…
Loin de déroger à la « tradition », Jean-Philippe Postel s’attelle avec brio à découvrir ce que Van Eyck a voulu nous dire. On ne compte plus les symboles répartis dans ce tableau. Tout est sujet à interprétation et l’auteur nous guide sur le chemin de la connaissance. C’est un érudit qui parle et si, parfois, le style peut paraître rébarbatif, j’étais suspendue à chaque page.
L’affaire Arnolfini est une pépite pour toute personne qui s’intéresse à l’art. Je ne saurais pas vous dire si c’est un essai, une enquête policière, un roman, une biographie du tableau. L’affaire Arnolfini est un joyau à mettre entre toutes les mains d’étudiants en histoire de l’art, de professeurs à l’université, de passionnés d’art flamand, bref, pour un public averti.
L’affaire Arnolfini de Jean-Philippe Postel
Éditions Actes Sud, 2016
9782330060916
160 p., 18€
Un article de Clarice Darling.
Hiver à Sokcho, d’Elisa Shua Dusapin
Signé Bookfalo Kill
Née d’un père français qu’elle n’a jamais connu et d’une mère coréenne, une jeune femme voit un jour débarquer dans la pension de famille où elle travaille un auteur de bande dessinée originaire de Normandie. Nous sommes à Sokcho, et un hiver rude s’installe sur cette petite ville portuaire à soixante kilomètres de la Corée du Nord. Dans ce théâtre hostile, deux trajectoires solitaires vont se croiser et tenter de se comprendre…
Voici l’une des jolies surprises de cette rentrée littéraire qui, faute d’être écrasée par une poignée de noms célèbres ou de romans ultra-médiatisés (et tant mieux qu’il en soit ainsi), laisse décidément de la place pour les découvertes singulières. Franco-coréenne comme sa narratrice, Elisa Shua Dusapin propose à 24 ans un premier roman plein de charme et de mystère, qui repose sur peu de choses et existe avant tout dans ses silences et ses non-dits.
Dans le récit de cette rencontre louvoyante entre deux personnalités que beaucoup de choses opposent, mais qui vont pourtant se rapprocher, on peut retrouver un peu de l’atmosphère de Lost in Translation, le très beau film de Sofia Coppola. À la valse hésitation des sentiments entre une jeune femme et un homme plus âgé, Hiver à Sokcho ajoute néanmoins les différends culturels séparant un Occidental et une Orientale ; et se montre plus rude dans les relations entre les personnages, qui s’affrontent plus souvent qu’ils ne s’approchent (voir surtout les rapports conflictuels entre la narratrice et sa mère ou son petit ami).
Bien que joliment menée, cette histoire s’avèrerait finalement assez insignifiante si le style d’Elisa Shua Dusapin ne la sublimait pas. Avec une maîtrise remarquable et un sens du rythme très particulier, la jeune romancière distille au fil de chapitres souvent courts et de phrases tout aussi brèves une somme pointilleuse de petits détails qui font la différence. Elle excelle dans les décors, les paysages, les attitudes, qu’elle croque en quelques mots judicieusement choisis, tout comme ses personnages subtilement incarnés. Le texte se nourrit de charnel, d’organique, aussi bien dans la tenue des corps (surtout celui de la narratrice) que dans la rapport à la matière – les poissons et crustacés que cuisine la mère de l’héroïne, la relation du dessinateur français au papier sur lequel il travaille…
Elisa Shua Dusapin instaure également avec brio l’atmosphère très particulière de Sokcho, ville pétrifiée par le froid et la neige, exotique pour le lecteur français à qui elle semble pourtant familière, tant la romancière parvient à la fois à en saisir la singularité coréenne et à en tirer un tableau universel.
Belle réflexion sur l’art (le dessin occupe bien sûr une place importante dans l’histoire), mais aussi la solitude, l’incompréhension, la cruauté ordinaire, Hiver à Sokcho est un très beau début en littérature pour une romancière que l’on sera enchanté de retrouver prochainement, car ce premier livre est une promesse qui mérite d’être tenue à l’avenir. Rendez-vous est pris !
Hiver à Sokcho, d’Elisa Shua Dusapin
Éditions Zoé, 2016
ISBN 978-2-88927-341-6
140 p., 15,50€
Josephine Baker de Catel et Bocquet
J’avais adoré Kiki de Montparnasse ou Olympe de Gouges, que le duo a écrit il y a quelques années déjà. Il y avait fort à parier que Joséphine Baker allait m’enchanter tout autant.
Catel a vraiment un sacré coup de crayon et cette biographie, toute de noir et de blanc, retrace la vie de la plus grande artiste noire américaine (puis française!) du 20ème siècle. Son enfance misérable, son éclosion puis sa gloire avant la déchéance. Un destin dont les Américains sont friands.
Seulement, retracer une vie de 69 ans en 460 pages, c’est difficile. Et il arrive parfois que l’on passe d’une vignette à l’autre en sautant plusieurs jours voire semaines et c’est difficile à suivre.
Les biographies en fin d’ouvrage sont en revanche les bienvenues. On ne sait pas toujours qui est qui pour les personnes les moins connues citées dans le livre et les bios sont très détaillées, très intéressantes.
En bref, encore un très bon travail de Catel et Bocquet avec la mise en lumière d’une femme extraordinaire, à la vie hors norme, tout comme les deux héroïnes de leurs deux précédents ouvrages.
Un livre à lire, à offrir, pour se remémorer cette reine du music-hall, cette grande dame de la Résistance, cette optimiste acharnée, qui recherchait le bonheur à tout prix.
Joséphine Baker de Catel et Bocquet
Éditions Casterman, 2016
9782203088405
563 p., 26,95€
Un article de Clarice Darling
La Correction, d’Elodie Llorca
Signé Bookfalo Kill
Non mais là, ça doit venir de moi, c’est pas possible autrement. Parce que, donc, j’ai lu ce premier roman d’Élodie Llorca (dramaturge, comédienne et scénariste, oui oui tout ça), et je n’ai pas tout compris. A la fin, en tout cas, parce que l’essentiel du livre se laisse lire sans problème.
Son résumé la vendait pourtant bien, cette Correction. Ça pouvait donner un truc intriguant, rigolo peut-être, ou bien flippant, allez savoir. Le narrateur, François, est correcteur professionnel. Il travaille pour un mensuel, la Revue du Tellière, sous la direction de Reine, une femme autoritaire et insaisissable qui trouble quelque peu notre héros. Mais ce qui ne tarde pas à le troubler encore plus, ce sont les coquilles de plus en plus nombreuses émaillant les articles qu’il corrige. Des coquilles grossières que François, travailleur précis et maniaque, est convaincu de n’avoir pu laisser échapper auparavant. Ces erreurs sont-elles rajoutées par Reine elle-même ? Si oui, quelles sont ses intentions ?
Perturbé, François voit sa vie lui échapper. Il ne comprend plus Marie, sa compagne, avec laquelle il vit en parfait étranger. Il trouve dans le caniveau un oiseau bizarre qu’il sauve puis trimballe partout au point d’en être obsédé. Et la mort de sa mère, sept mois plus tôt, lui pèse plus qu’il ne saurait l’admettre…
C’est assez important, cette histoire de mort de la mère. Pendant un moment, je me suis demandé si, consciemment ou pas, Élodie Llorca n’était pas en train de nous proposer une variation sur L’Étranger de Camus. Le décrochage mental du narrateur, son obsession pas bien réglée pour sa mère, ses errances et son détachement du quotidien, il y a pas mal de Meursault dans le François de la Correction.
Mais n’allez pas lire ce que je n’ai pas écrit : ce livre n’a évidemment pas un quart du tiers de la moitié de la puissance de celui de Camus. D’ailleurs, ma comparaison n’est pas très charitable, alors oubliez-la. Mais j’avoue qu’au-delà de ça, je ne sais pas trop quoi tirer de cette Correction. Les chapitres très courts (deux pages maximum en général) et le style clair et efficace font glisser la lecture comme un collutoire au fond d’une gorge enrouée. C’est un roman assez poisseux, qui met mal à l’aise, sans pourtant creuser assez les personnages. Surtout, l’histoire même des coquilles s’avère vite anecdotique, elle ne prend qu’une place mineure dans l’intrigue, alors qu’on aurait pu attendre plus de cette idée au fort potentiel. Bon, si, j’imagine qu’il y a un lien subliminal entre les coquilles et l’oiseau bizarre que trouve le héros, mais sinon…
Non mais après, c’est possible, j’y reviens, c’est possible que je n’aie rien compris. Parce que, vraiment, la fin du roman… Bon, si, oui, on devine certaines choses (pas exprimées clairement, ce qui est d’ailleurs très bien, pas la peine d’enfoncer des portes quand les laisser entrouvertes garantit le malaise bien plus finement), mais sinon… Oui, bon, okay, je n’ai pas tout compris. Je vous laisse voir, du coup. Et si vous avez des théories, n’hésitez pas, je prends !
La Correction, d’Élodie Llorca
Éditions Rivages, 2016
ISBN 978-2-74363-338-7
188 p., 18€
Une fille et un flingue, d’Ollivier Pourriol
Signé Bookfalo Kill
Les frangins Aliocha et Dimitri rêvent de cinoche. Cannes, les marches, les stars, le grand écran, les vivats du public, l’argent… Ah oui, l’argent, parlons-en. Le nerf de la guerre, du genre qui empêche de monter au front si on n’en a pas. Fauchés comme les blés, étudiants à l’école de cinéma de Luc Besson, les deux frères décident alors d’appliquer l’un des préceptes de leur mentor : « Un film, c’est un hold up. »
Au culot, ils imaginent alors un scénario improbable, qui implique la participation active de Catherine Deneuve et Gérard Depardieu. Rien de moins ? Quand on n’a pas de pognon, on a des idées, hein – et on sait jamais, ça pourrait marcher…
Voici une comédie (dé)culottée sur le cinéma, d’autant plus crédible qu’Ollivier Pourriol fraye dans ce milieu. Pas du genre langue de bois (on se souvient de On/Off, son pamphlet impitoyable contre le Grand Journal dont il avait été chroniqueur malheureux durant un an), Pourriol s’amuse donc beaucoup avec un paquet de figures du cinéma français, des vedettes citées ci-dessus à d’autres, souvent évoquées par leurs seuls prénoms mais très vite reconnaissables pour peu que l’on connaisse un peu ce petit monde.
Pour les mettre en scène, il imagine une histoire complètement frappadingue, qui réserve quelques surprises amusantes (le personnage de Deneuve est exploité d’une manière fort réjouissante) et surtout des dialogues en forme de morceau de bravoure, dont Depardieu est souvent le héros. Depardieu, héros de papier dont la grandiloquence, l’excès et la clairvoyance désabusée servent de porte-parole à un regard sans concession sur le cinoche à la française, toujours avec humour néanmoins.
Bon, par contre, on ne lira pas Une fille et un flingue pour son style, sa mise en forme se limitant le plus souvent à des dialogues balancés à l’emporte-pièce. Ca marche, c’est efficace, mais d’un point de vue littéraire, c’est sans grand intérêt. Évoluant dans un registre proche de Laurent Chalumeau (Kif), Ollivier Pourriol joue la carte de la pochade hautement référencée, et s’offre par le roman un casting de rêve (incluant Godard et Steven Spielberg !) qui ne prend pas grand-chose au sérieux. Sympa sans plus, mais assez réjouissant pour qui s’intéresse aux coulisses pas forcément glorieuses du Septième Art.
Une fille et un flingue, d’Ollivier Pourriol
Éditions Stock, 2016
ISBN 978-2-234-08031-7
288 p., 19€