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Le Cinquième diamant, d’Éric Faye

Alors qu’un climat de guerre froide influence de nouveau la marche du monde, d’étranges lumières dans le ciel provoquent la mise en sommeil de missiles nucléaires russes. Armes nouvelles de l’adversaire ? Complotisme ? À la CIA comme à la Maison-Blanche, on s’inquiète, car on sait bien que l’armée américaine n’est pour rien dans ce qui a touché la base russe.
Dans le même temps, Janet et Mike, un couple d’astrophysiciens américains spécialistes des exoplanètes, repèrent au cours d’une nuit d’observation un objet intersidéral entré dans le Système solaire, dont la nature exacte déclenche une vive polémique entre scientifiques...


Drôle de roman.

Ça commence comme un roman policier teinté d’espionnage, avec le meurtre d’un oligarque russe dans un hôtel isolé de Suisse, et l’interrogatoire de la jeune femme qui l’accompagnait, une escort qui semble inquiète et sous-entend que sa propre vie pourrait également être menacée. L’atmosphère est surannée, un peu hors du temps, entre John Le Carré et Agatha Christie, hormis que le style garde une certaine modernité.
Puis on bascule dans une ambiance X-Files, avec bases secrètes chargées de missiles létaux, sécurité hyper renforcée, paranoïa à tous les niveaux, et de drôles de lumière dans le ciel qui viennent tout dérégler sans qu’on comprenne pourquoi ni comment.
Avant, un peu plus tard, d’ouvrir la porte des mystères de l’espace infini, façon Contact de Carl Sagan (et le film de Robert Zemeckis qui en a été tiré), et d’emboîter le pas d’un couple de scientifiques croyant surprendre la traversée aberrante de notre système solaire par un objet non identifié, qui pourrait constituer la première preuve tangible de l’existence d’une autre forme d’intelligence, ailleurs que sur la Terre…

Contre toute attente, Éric Faye parvient à lier le tout, en prenant soin de ne pas perdre son lecteur en route. Il le fait avec un peu d’humour bien placé, des personnages solides, et surtout des recherches à l’évidence sérieuses sur ces différents sujets – et d’autres, qui viennent s’y ajouter en surimpression.
Ainsi, avec un à-propos foudroyant, on assiste au revirement hystérique de l’opinion orchestré par des assassins médiatiques transformant les plateaux de télévision en arène de mise à mort intellectuelle. On capte le basculement idéologique des États-Unis durant la fin de règne crépusculaire de Joe Biden, les sordides jeux de manipulation politique dans les coulisses du pouvoir, ou l’esprit de terreur qui règne dans une Russie écrasée par l’ombre glaciale de son despote.
Mais on plonge aussi, avec un grand intérêt, dans le monde vertigineux de l’astrophysique, tiraillé entre minces espoirs et grandes désillusions, mais acharnée à poursuivre sa compréhension de notre place dans l’immensité de l’espace, et ses recherches sur ces ailleurs qui fascinent autant qu’ils angoissent.

Protégé par la solidité littéraire d’un auteur aguerri, capable de passer sans trembler de merveilleux recueils de nouvelles étranges et inspirantes (Je suis le gardien du phare, Quelques nobles causes pour rébellions en panne) à des romans (treize à ce jour en comptant celui-ci), des essais ou des récits de voyage, Le Cinquième diamant s’appuie sur son intelligence, mais finit tout de même, sous le feu croisé de ses intrigues, par pencher un peu de travers. Notamment dans sa troisième partie, qui s’égare dans de nouvelles sous-intrigues pas forcément réussies (la relation de couple entre les deux astrophysiciens, fade et bateau), et s’étire en longueur autant qu’elle perd en force.
Un affaissement qui lui fait perdre de sa saveur, voire de son originalité, d’autant qu’il cache à grand-peine les difficultés de l’auteur à boucler toutes ses intrigues, résolvant certaines de celles qui ouvraient le roman d’une manière expéditive, un peu regrettable.

Un roman qui commence fort bien, instaure un charme étonnant et stimule la curiosité, mais perd un peu en route son point de vue et finit par ne plus trop savoir ce qu’il voulait raconter, au milieu de ses lignes de réflexion finalement peut-être trop nombreuses pour convaincre toutes ensemble. Mais qui donnent, tout de même, un véritable intérêt et une ambition salutaire à ce texte qui assume son originalité et son goût pour la fiction, le suspense et l’aventure.
J’aurais aimé adorer sans réserve, mais c’est un très bon moment de lecture tout de même.

Le Cinquième diamant, d’Éric Faye
Éditions du Seuil, 2025
ISBN 9782021534085
352 p., 21€

5 réponses à « Le Cinquième diamant, d’Éric Faye »

      1. Non, pas pour elle ! :lol: Non, juste dommage que ce roman ait perdu en route son point de vue et a fini par ne plus trop savoir ce qu’il voulait raconter…

      2. Oui, ça arrive. Dans le cas présent, ce n’est pas catastrophique, loin de là, cela reste un roman intéressant, bien écrit, je n’ai juste pas été convaincu par la conduite générale de ses intrigues et par sa dernière partie.

      3. Râlant quand ça foire dans la dernière partie…

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