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Vous écrivez ? Le roman de l’écriture, de Jean-Philippe Arrou-Vignod

« Ce petit livre n’est pas un cours. Moins encore une boîte remplie de clefs. Son ambition : tenter de décrire ce qu’est le travail du romancier. Que fait-il lorsqu’il est à sa table ? Comment invente-t-il une histoire, des personnages ? Comment parvient-il à les faire voir, agir et parler au point de nous donner l’illusion, à nous lecteurs, qu’ils ont une existence ? Cette entreprise à laquelle vous vous promettez, que vous avez peut-être entamée déjà – écrire un livre -, en quoi consiste-t-elle ? »
Jean-Philippe Arrou-Vignod ne donne pas ici de recettes pour écrire un bon roman, mais partage un savoir-faire et le goût de son métier. En s’appuyant sur des exemples concrets qui parleront à tous, il examine les grands mécanismes à l’œuvre dans l’art romanesque. Pour celui qui se lance, c’est un chemin vers le plaisir d’écrire et l’espoir de réussir. Pour les autres, qui n’écrivent pas mais qui aiment les histoires, c’en est une passionnante : celle de l’écrivain qui les invente.


Vous écrivez ?

Il y en a sûrement quelques-uns parmi vous, ne vous cachez pas.
Moi, en tout cas, ça m’arrive. (Ô surprise.) Depuis une trentaine d’années, avec plus ou moins d’assiduité suivant le temps disponible dont je dispose. Énormément au début, sans trop réfléchir, en commettant sans aucun doute toutes les erreurs que l’on fait forcément quand on ne réalise pas encore qu’écrire nécessite de mobiliser tout un faisceau de techniques linguistiques et une gamme extrêmement vaste de possibles dans la manière de raconter une histoire. Puis moins, mais de manière plus maîtrisée, plus réfléchie, grâce à cette expérience acquise au fil des ans, des essais, des échecs, de quelques satisfactions glanées à l’occasion également.

Au bout d’un moment, normalement, on finit par avoir une idée plus précise, non seulement de ce qu’on veut raconter, mais aussi et surtout de comment le faire. Cela ne vous transforme pas en Victor Hugo, mais cela donne quelques automatismes qui permettent de compenser l’insouciance des débuts.
De temps en temps, néanmoins, il est bon de remettre à plat les rares certitudes que l’on a pu se forger, histoire de se conforter dans l’idée qu’on ne fait pas totalement fausse route depuis toutes ces années. Le livre de Jean-Philippe Arrou-Vignod – on y arrive enfin – sert précisément à cela. Ni cours ni manuel d’écriture, encore moins démonstration de creative writing, cet essai opte pour la simplicité et la clarté, avec le souci de toujours garder son lecteur – et l’apprenti écrivain qui l’accompagne – sur les rails.

Les six premières parties résument les plus grands principes d’écriture à maîtriser : « Commencer« , « Personnages« , « L’intrigue« , « Scènes« , « Dialogues » et « Décrire« .
Pour explorer ces différents aspects, Arrou-Vignod s’appuie autant sur son expérience d’éditeur (chez Gallimard-Jeunesse) que d’écrivain (jeunesse et pour adultes) afin de partager certaines de ses convictions, sans jamais se montrer péremptoire. Cela va du choix du temps d’écriture (présent, passé ?) au besoin ou non d’écrire avec un plan (j’aime beaucoup sa différence entre l’écrivain architecte, qui prépare tout à l’avance, et le tisserand, qui navigue davantage à vue), en passant par la composition des personnages ou l’art subtil des dialogues.
Rien de révolutionnaire dans tout cela, mais encore une fois, la limpidité avec laquelle Arrou-Vignod traverse ces problématiques peut faire beaucoup de bien à un apprenti écrivain qui, par définition, se confronte très souvent au doute.

La septième partie, « Comment écrivent les écrivains », s’intéresse aux rituels, aux habitudes, aux tics des romanciers, à l’environnement qu’ils ont besoin de créer autour d’eux pour pouvoir faire parler leur imagination. Cela paraît plus anecdotique, mais là encore, mine de rien, Jean-Philippe Arrou-Vignod aborde un aspect de la création qui fascine nombre d’aspirants écrivains, lesquels pensent trouver dans les méthodes des autres la raison de leur succès. (Scoop : ça ne marche pas comme ça.)
La huitième et dernière partie, enfin, focalise sur la littérature jeunesse, dont l’auteur est un très fin connaisseur, comme auteur et comme éditeur. Forcément très intéressant pour qui se destine à cette littérature dont le niveau d’exigence est au moins équivalent à celle destinée aux adultes, si ce n’est plus, car les enfants et les adolescents sont des lecteurs sans doute beaucoup moins patients et indulgents que les grands.

Si les coulisses de l’écriture vous intéressent et que vous recherchez une approche simple et authentique, un point de vue professionnel soucieux de proposer un regard clair et posé sur l’art d’écrire en insistant sur les fondamentaux d’une discipline qui a sans doute autant de règles que de pratiquants, Vous écrivez ? devrait vous contenter. Pour ma part, j’ai trouvé mon compte dans son humilité et sa limpidité, et je pense m’y replonger régulièrement, tout ou partie.

Vous écrivez ? Le roman de l’écriture, de Jean-Philippe Arrou-Vignod
Éditions Gallimard, 2017
ISBN 9782072735370
208 p., 18€

6 réponses à « Vous écrivez ? Le roman de l’écriture, de Jean-Philippe Arrou-Vignod »

  1. Mince, il est manquant ! Ton texte m’avait donné sacrément envie… :) Il va falloir attendre que Gallimard le réédite, ou le trouver ailleurs…
    Merci pour ce chouette article !

    1. Coucou Mélanie !
      J’espère que tu vas bien :)
      Mince, je n’ai pas vérifié sa dispo avant de poster… C’est vrai qu’il date un peu, mais c’est dommage.
      Chers et chères ami(e)s des éditions Gallimard, le message est lancé : on veut une réédition ou un poche de Vous écrivez ? !!!

  2. oh c’est rigolo que tu postes une chronique sur un livre sur l’écriture alors que j’ai lu il y a peu « Le plaisir de la peur » de Franck Thilliez sur le même sujet. J’avoue que tu me tentes beaucoup ! ;) Merci pour cette découverte… :)

    1. Oui !!! J’ai écrit cette chronique il y a un bon moment déjà, et j’ai lu depuis ton article sur le livre de Thilliez qui m’a beaucoup intéressé. J’y pense régulièrement, je pense que je finirai par le lire tôt ou tard :)
      Je n’en ai pas lu beaucoup, mais j’aime bien les essais sur l’écriture, surtout d’écrivains bien sûr. Dans le genre, celui de Stephen King, Écriture, est un incontournable dans lequel je replonge souvent avec plaisir.

      1. Ah Stephen King !! Le Maître !! J’ai lu « Ecriture ; Mémoires d’un métier » il y a quelques temps maintenant et le souvenir de lecture qui m’en reste est d’un excellent moment ! Je viens de relire ma chronique sur Babélio, oui j’avais beaucoup aimé. Peut-être le relire, comme toi, bien que globalement je ne relis quasiment jamais un livre, car ma PAL est trop énorme ! ;) En tout cas, je me suis noté « Le roman de l’écriture » ! :)

      2. Maintenant que je ne suis plus libraire, je m’autorise à relire, sans culpabiliser, et ça fait un bien fou :)
        Ça n’empêche pas les envies de lecture inédites de s’accumuler, mais il y en a tout de même moins qu’avant, et elles peuvent toutes attendre !

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