Quand vient la nuit, de Dennis Lehane

Signé Bookfalo Kill

Bob Saginowski est barman dans le bar de son cousin Marv, à Boston, qui sert de relais à la mafia tchétchène du quartier pour leurs différents trafics. Taciturne et solitaire, se tenant à l’écart du monde pour éviter de faire resurgir de vieux démons qui le taraudent, sa vie bascule pourtant le jour où il découvre un chiot abandonné dans une poubelle devant la maison de Nadia, une jeune femme avec qui il se lie d’amitié.
Quand le bar se fait braquer un soir et qu’une armée de personnages peu recommandables achèvent de perturber sa tranquillité difficilement acquise, Bob doit faire des choix qu’il espérait ne plus avoir à faire…

Lehane - Quand vient la nuitCe n’est pas très agréable à admettre, mais voilà un roman de Dennis Lehane qui, pour moi, ne restera pas dans les annales. Il faut dire que le bonhomme nous a habitués à planer tellement haut dans le ciel du polar qu’un opus tout juste bon, comme Quand vient la nuit, paraît presque décevant.
L’origine de ce livre y est peut-être pour quelque chose. Il s’agit en effet d’une extension d’une nouvelle intitulée Sauve qui peut, que Lehane a reprise et étoffée pour en faire à la fois ce roman et un scénario de long métrage. Le film sortira en novembre et vaudra pour être la dernière apparition à l’écran de James « Soprano » Gandolfini ; difficile à croire, à moins d’une mise en scène révolutionnaire de Michaël R. Roskam (réalisateur belge de Bullhead), qu’il marquera davantage l’histoire du cinéma, tant son intrigue n’a rien de spectaculairement original.

Pour le dire autrement, Quand vient la nuit aurait pu être écrit par un autre auteur un peu talentueux. Hormis le fait que le récit se déroule à Boston, sa ville fétiche, et en-dehors de quelques fulgurances psychologiques bien dans son style, rien ne trahit spécialement la patte de Dennis Lehane. Il lui manque cette force, cette énergie sombre, cette clairvoyance humaine qui sont sa marque de fabrique. Il lui manque tout simplement le souffle extraordinaire qui a amené Mystic River, Shutter Island ou Un pays à l’aube directement au rang de classique, et fait aussi de sa série Kenzie-Gennaro un must du polar urbain, sombre et désespéré.

Sans doute, accoutumé à cette puissance hors norme, suis-je devenu trop exigeant avec Dennis Lehane. Je dois donc être honnête et reconnaître que Quand vient la nuit se lit très agréablement, que ses personnages sont bien dessinés, que l’ensemble assume sa noirceur et dresse le portrait glaçant d’une ville rongée par la corruption, la mafia et la folie ordinaire, au point de faire s’effondrer les valeurs « refuges » que sont l’honnêteté ou la spiritualité (à l’image d’une église qui ferme pour être transformée en complexe immobilier luxueux).
A l’écrire ainsi, vous comprendrez, je l’espère, que c’est un bon polar. Certes, sans l’étincelle qui fait le grand roman, mais tout de même très plaisant à lire. Oui, c’est déjà ça !

Quand vient la nuit, de Dennis Lehane
Traduit de l’américain par Isabelle Maillet
  Éditions Rivages, coll. Thriller, 2014
ISBN 978-2-7436-2905-2
270 p., 14,50€

Publicité

6 Réponses

  1. Je n’ai plus trop d’estime pour Lehane comme pour Winslow qui,succombant aux sirènes hollywwodiennes, n’écrivent plus des romans mais des scenarii prêts à être filmés.
    Dommage.
    Belle journée aux cannibales lecteurs.

    28 octobre 2014 à 11:13

    • Hélas, le constat est cruel mais il est juste… On peut toujours espérer qu’ils se reprennent un jour en mettant la distance nécessaire avec ce système trop formaté pour revenir à la seule vérité du geste littéraire.

      Pour ma part, je garde foi en Lehane, il m’a trop époustouflé par le passé pour que je le croie définitivement perdu. Croisons les doigts ! ;-)

      Bonne journée à toi, ami Unwalker !

      28 octobre 2014 à 12:01

  2. Passe ! ça me ferait mal de lire un nanar de Lehane :(

    31 octobre 2014 à 22:02

    • Parler de nanar serait trop sévère quand même ;-)
      Ce roman se lit agréablement et fonctionne bien, il m’a juste paru pâlot par rapport aux dernières parutions de Lehane, avec lesquelles la comparaison est inévitable et donc peu flatteuse.
      Mais le lire quand il paraîtra en poche devrait te faire un moment sympa, à partir du moment où tu n’en attends pas un chef d’oeuvre !

      31 octobre 2014 à 23:10

      • On a tellement l’habitude avec Lehane d’avoir du tout bon que s’il descend d’un cran, on est déçu ! ;)

        Ok, j’attendrai sa sortie en poche ou en numérique et je le lirai sans attendre de lui qu’il m’emporte vers d’infini et l’au-delà :D

        3 novembre 2014 à 09:55

  3. alexmotamots

    Dommage, je me faisais une joie….

    2 novembre 2014 à 19:13

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s