Puzzle, de Franck Thilliez
Signé Bookfalo Kill
Depuis que sa petite amie Chloé l’a plaqué un an plus tôt, Ilan Dedisset n’a plus goût à rien. Même son addiction pour les jeux et les chasses aux trésors grandeur nature l’a abandonné, et depuis il vivote dans la maison de ses parents, disparus en mer. Il n’a pas d’amis et même ses collègues de la station-service où il travaille l’évitent.
Lorsque Chloé ressurgit en affirmant avoir enfin trouvé la clef d’entrée de Paranoïa, le jeu à taille réelle le plus mystérieux et donc le plus excitant de tous les temps, Ilan accepte de se remettre en chasse – pour le pire seulement…
Ça démarre plutôt bien, il faut l’avouer. Un massacre dans la montagne, un suspect dénommé Lucas Chardon appréhendé au milieu des cadavres mais qui ne se souvient de rien ; puis on fait connaissance avec Ilan, de prime abord bien campé et intéressant, et avec Chloé, on suit les étranges étapes d’une chasse au trésor en plein Paris…
Mais ensuite la machine se grippe peu à peu. Il y a d’abord ces symboles un peu lourds auxquels Thilliez recourt (l’organisateur du jeu s’appelle Virgile Hadès… Hum !), détails secondaires, presque superficiels certes. J’aurais sûrement pu faire abstraction si la suite de l’histoire ne se mettait pas à patiner. Une fois que les personnages arrivent dans le décor principal du roman, un complexe psychiatrique désaffecté, les clichés s’accumulent, à la croisée trop manifeste de Shining, Shutter Island et Sixième Sens de M. Night Shyamalan.
Bon, j’essaie de demeurer honnête, cela reste efficace – même si j’ai parfois survolé certains passages, la faute à des longueurs censées retarder des révélations importantes. Mais allez, encore une fois, passons. Ces réticences viennent aussi de moi. Je sais que j’ai de plus en plus de mal avec les thrillers à grand spectacle, ces bouquins spectaculaires appuyés sur des recettes établies et des ficelles (souvent grosses) qui sautent rapidement aux yeux, privant le lecteur aguerri et attentif de toute surprise.
Surtout quand l’écriture de l’auteur ne se montre pas d’une grande élégance littéraire… C’est le cas chez Thilliez, qui n’est pas un virtuose de la plume ; mais dans tous les romans de lui que j’ai lus auparavant, l’histoire était largement assez forte, originale, nourrie de recherches, portée par des personnages solides, pour dépasser ce handicap. Je précise également, avant de me faire lyncher par les nombreux fans de l’ami Franck, que je le considère comme l’un des tout meilleurs du genre dans son registre en France, égal voire parfois supérieur à Jean-Christophe Grangé.
Là, désolé, je n’ai pas marché, disons-le tout net, pour deux raisons majeures. La première tient au personnage d’Ilan, faible, versatile, parfois tellement naïf qu’il finit par en paraître stupide ; à part au début, où il avait de l’allure, y compris dans ses failles (qui peuvent, et font souvent apprécier un bon personnage), j’ai été incapable d’éprouver de l’empathie pour lui, et il m’a vite agacé.
Deuxième raison, mais c’est la plus importante : il s’agit de la fin. La révélation du « mystère ». Je l’avais devinée dans les vingt premières pages. Non, je ne suis pas un génie, hein. C’est surtout que certains des premiers indices sont flagrants, et que la construction elle-même d’un passage en particulier dévoile involontairement la vérité.
Pendant tout le roman, j’ai donc attendu LA surprise, voulu croire qu’il s’agissait d’une fausse piste grossière pour abuser des petits malins dans mon genre, qui croient tout comprendre avant tout le monde et se retrouvent ridicules quand le romancier sort, non pas un lapin, mais une girafe de son chapeau. Hélas, pas de girafe, pas même une autruche ou un flamand rose. C’est un lapin, tout ce qu’il y a de plus classique, tellement attendu que c’en est triste. Dans le chapitre final, l’explicitation de quelques détails et menus indices reste sympa, assez pour se dire : « Ah oui, bien vu ! » Mais dans l’ensemble, cela reste pauvre et décevant.
Voilà, j’ai dit ce que je pensais de ce Puzzle dont la belle couverture m’attirait autant que le pitch, et que j’aurais bien voulu apprécier. Franck Thilliez ayant un large réseau de fans dévoués, je sais que la plupart d’entre eux n’auront pas mes réserves et prendront plaisir à ce nouveau roman. Tant mieux pour eux, et tant pis pour moi !
Puzzle, de Franck Thilliez
Éditions Fleuve Noir, 2013
ISBN 978-2-265-09357-7
429 p., 20,90€
J’ai aussi été très déçu. J’ai été pas mal accroché pendant toute la première partie, mais dès que les joueurs se retrouvent dans l’hôpital… mon dieu que c’est long ! Le final m’a même gâché le plaisir pris dans la première partie. Tout ça pour ça…. C’est d’autant plus énervant que, jusqu’à l’hôpital, tout était finalement suffisament crédible et logique pour qu’on puisse imaginer une fin un peu plus originale. Dans le même genre, Vertige était vraiment meilleur.
7 octobre 2013 à 23:49
Je n’ai pas lu Vertige, auquel plusieurs lecteurs comparent déjà Puzzle, mais je ne suis pas sûr d’avoir envie de le faire, en tout cas pas tout de suite. J’attendrai un prochain Thilliez, avec Sharko-Hennebelle ou pas d’ailleurs, pour me « réconcilier » avec lui ! Ou bien peut-être me plongerai-je dans un de ses premiers romans, que je n’ai pas encore lus…
En tout cas, merci pour ton avis, qui confirme donc le mien… hélas !
8 octobre 2013 à 09:26
Vertige vaut vraiment le coup. Franchement. Et la fin (que peu de gens ont capté, je m’en suis rendu compte en interrogeant un peu autour de moi) est vraiment bonne. (par contre je suis pas trop fan de la série des Sharko-Hennebelle). Très influencé par les films de série B et d’horreur à la Saw. (dan le même genre j’ai hâte de découvrir le prochain livre du mec qui a écrit le livre sans nom)
8 octobre 2013 à 20:38
Bien noté pour Vertige, je me laisserai tenter à l’occasion. Ce que tu en dis attise ma curiosité…
Moi aussi, j’ai hâte de me plonger dans Psycho Killer, le nouveau Anonyme ! Je viens de récupérer le service de presse, mais je dois d’abord terminer le nouveau Sharon Bolton, « Ecrit en lettres de sang », qui est bien meilleur que ce que je craignais, et qui accapare toute mon attention pour le moment.
13 octobre 2013 à 10:58
Un lecture sans doute plus grand publique.
9 octobre 2013 à 18:15
Sûrement – même si je ne pense pas que c’était le but de Thilliez, il voulait faire quelque chose de différent, et cela plaira encore à nombre de ses fidèles lecteurs. Mais pas à moi…
13 octobre 2013 à 10:52
Moi aussi je viens de recevoir Psycho killer (j’adore la couv’, un petit côté Guns n’ Roses qui me rappelle ma jeunesse :) ), mais il faut que je finisse le Bill Pronzini (qui réapparaît enfin après plus de 10 ans d’absence en France) ! Arh, c’est trop dur !
16 octobre 2013 à 20:07
J’ai dépassé la moitié de Psycho Killer, ça se lit tout seul, comme d’habitude :-) Chronique à venir très bientôt !
Le Pronzini n’est pas dans ma (très longue) liste de romans à lire, mais si tu es très convaincant, je me montrerai peut-être attentif ;-)
18 octobre 2013 à 00:08