Le Collier rouge, de Jean-Christophe Rufin
Signé Bookfalo Kill
Août 1919. Une chaleur écrasante accable ce coin de campagne. Un jeune homme de 28 ans est le seul occupant de la prison. C’est Morlac, un héros de la Première Guerre mondiale, plusieurs fois blessé, décoré de la Légion d’Honneur – une distinction rare et méritée à l’époque ; et pourtant on l’accuse d’outrage à la Nation.
Devant la prison, son chien l’attend. Comme son maître, cabossé, blessé. Comme son maître, aboyant sans fin sa colère. Car, face à l’ancien officier Hugues Lantier du Grez, le juge militaire venu régler son cas, Morlac ne nie pas, au contraire il revendique son geste. Arbitrée par une jeune femme qui bientôt apparaît dans l’équation, la discussion s’engage entre les deux hommes, âpre et prompte à ébranler quelques certitudes…
Du geste de Morlac, on ne sait rien avant la fin de ce bref roman. La compréhension d’une bonne partie de l’intrigue reposant sur ce mystère soigneusement entretenu par Jean-Christophe Rufin jusqu’au dénouement, je n’en dirai donc pas davantage.
C’est en tout cas une belle histoire, inspirée d’un fait divers réel, que l’auteur de Rouge Brésil déroule dans le Collier rouge, avec une simplicité de mise en scène qui n’exclut pas la profondeur des sentiments et des personnages. Tout repose sur le dévoilement progressif et subtil des convictions des uns et des autres, et leur confrontation qui amène à les remettre en cause. A ce petit jeu, personne n’est épargné, révélant en creux une jolie réflexion sur la fidélité et les principes.
Bien qu’il adopte un point de vue similaire – le lendemain de la Première Guerre mondiale et ses conséquences sur les hommes -, le Collier rouge n’a pas la puissance d’Au revoir, là-haut de Pierre Lemaitre. Disons-le clairement, les deux livres n’ont pas la même ambition. Au vaste et admirable foisonnement du Prix Goncourt 2013, à sa grandeur de fresque littéraire et humaine, à sa terrible mise en accusation historique et politique, Rufin préfère le cadre restreint d’une histoire plus simple, néanmoins émouvante. Sa réussite tient aussi à cette différence, à cette humilité, que l’on retrouve dans son style pur et élégant.
Le centenaire du premier grand conflit mondial inspire décidément les bons romanciers français contemporains. La preuve avec ce Collier rouge, que je vous recommande volontiers.
Le Collier rouge, de Jean-Christophe Rufin
Éditions Gallimard, 2014
ISBN 978-2-07-013797-8
156 p., 15,90€
Il a l’air meilleur que « Globalia » du même auteur, qui m’avait déçu.
27 mars 2014 à 19:19
Sans aucun doute. Globalia m’était tombé des mains également, je ne l’avais même pas terminé. Celui-ci est sobre, concis, facile mais de qualité.
Et puis il est beaucoup plus court :p
28 mars 2014 à 08:18