Du domaine des murmures de Carole Martinez
J’ai décidé de lire cet ouvrage suite au Prix Goncourt des Lycéens qu’il a raflé. Généralement, les Prix Goncourt des Lycéens (et pas le Prix Goncourt « normal ») est pour moi signe de qualité. Le rapport de Brodeck de Philippe Claudel, Le club des incorrigibles optimistes de Jean-Michel Guenassia, Magnus de Sylvie Germain, Allah n’est pas obligé d’Ahmadou Kourouma (pour ne citer que ceux que j’ai lus)
Bon, comment vous dire… Je ne cache pas ma déception. Je suis même à la limite de la colère. Je vous fais d’abord un bref résumé et ensuite, des explications.
En l’an 1187, Esclarmonde, fille du seigneur des Murmures, décide de dire non à l’autel où l’archevêque s’apprête à ordonner le mariage. Elle n’épousera pas Lothaire, ce gros lourdaud violeur de jeunes filles, bête comme ses pieds et dangereux qui plus est. Plutôt que le mariage avec cet abruti, elle choisit de devenir une recluse. Les reclus, ce sont ces moines ou moniales qui décident de rester enfermés dans une cellule leur vie (ou une partie de leur vie) durant pour faire pénitence et prier pour les pêchés des autres. Ainsi donc, Esclarmonde se retrouve emmurée pour l’éternité, avec simplement une petite ouverture sur le monde, pour passer la nourriture et s’entretenir avec les personnes qui désirent parler à Dieu par son intermédiaire. Mais elle pensait entrer seule dans cette cellule. Elle ne s’attend pas à ce qui va lui arriver.
Je ne peux pas en dire plus sous peine de dévoiler l’intrigue (mince) du roman. Du domaine des murmures est un ramassis de clichés contemporains calqués sur ces temps moyenâgeux et l’écriture pseudo-poético-médiévale alambiquée n’arrange rien à l’affaire. Vous aurez donc pêle-mêle, un chevalier éconduit qui finit par devenir troubadour et vient chanter des chansons d’amour à son ex-fiancée, un père autoritaire et pas très sympa, une pauvre fille pratiquement persuadée d’être la réincarnation de la Vierge, des gens avec les stigmates, des croisés en Terre-Sainte qui se font massacrer…
On sent le travail historique effectué par Carole Martinez, mais ce style adopté pour l’occasion (je n’ai pas lu Coeur cousu, qui est, paraît-il est très bien.) m’a profondément ennuyé et même parfois éclater de rire. A propos du fameux jeune amant éconduit qui devient ménestrel, une réplique m’a fait bien rire : « Montfaucon (le père du jeune homme, ndlr) (…) te dit sorcière et t’accuse d’avoir noué l’aiguillette de son fils. » C’est joliment dit.
Mais on voit venir les choses gros comme un camion et j’imaginais déjà la fin du roman avant d’avoir lu les vingt premières pages. Ca tourne en eau de boudin assez rapidement et les apostrophes d’Esclarmonde à l’intention du lecteur sont vraiment fatigantes. « Certes, ton époque n’enferme plus si facilement les jeunes filles, mais ne te crois pas pour autant à l’abri de la folie des hommes. (…) Quant à la mort, que puis-je t’en dire sinon que je n’ai pas atteint depuis ma fin la légèreté qui me permettrait, échappant à ces pierres, de rejoindre l’éther (…). »
Bref, un roman heureusement court, mais dont j’attendais beaucoup plus, du fait de son statut de Prix Goncourt des Lycéens. Quand j’aurai le temps, je lirai Coeur cousu, histoire de voir ce que peut vraiment écrire Carole Martinez.
Du domaine des Murmures de Carole Martinez
Editions Gallimard
9782070131495 2011
200 pages, 16€90
Un article de Clarice Darling.
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