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Constellation d’Adrien Bosc

Bosc - ConstellationOn sait tous les conditions tragiques du décès de Marcel Cerdan, le fabuleux champion de boxe, l’amant d’Édith Piaf. Le crash de l’avion Constellation sur le mont Redondo aux Açores, il y a 65 ans.

Certains se souviennent qu’il y avait également Ginette Neveu, jeune violoniste prodige, qui se rendait aux États-Unis pour un tournée. Mais les autres sont de tristes inconnus. A peine ont-ils laissé des traces dans les mémoires d’aujourd’hui.

Adrien Bosc relève le défi de les convoquer tous, une ultime fois. Il mène une véritable enquête journalistique pour nous permettre de connaître tous les tenants et les aboutissants de cette triste histoire. L’écriture est assez singulière, plutôt journal de bord d’un journaliste pour Le Monde que style ampoulé de vigueur dans les hautes sphères littéraires mais qu’importe, cela marche.

On a le cœur serré avec ces petits bergers basques qui ont mis toutes leurs économies pour se payer ce voyage, on pleure sur le sort qui s’acharne contre cette jeune femme de Mulhouse, bobineuse, qui apprend qu’elle est l’héritière d’une usine de bas-nylon du côté de Détroit, on soupire de soulagement avec le couple qui a échangé son billet à la dernière minute pour laisser la place à Marcel Cerdan et son entraîneur…

J’ai aimé le début de l’ouvrage. C’est clair, concis, avec juste ce qu’il faut de poésie pour rendre le récit encore plus tragique qu’il ne l’est déjà. Mais plus on avance dans le livre, plus Adrien Bosc part dans des envolées lyriques qui font un effet bœuf, mais qui perdent le lecteur plutôt qu’autre chose.

Au final, un joli roman (essai? article?), qui plaît pour son écriture journalistique et sa singularité dans cette rentrée littéraire. De là à lui remettre le Prix de l’Académie Française… Mais les Cannibales sont bons lecteurs et adressent au jeune auteur leurs salutations les plus carnassières.

Constellation d’Adrien Bosc
Éditions Stock, 2014
9782234077317
198p., 18€

Un article de Clarice Darling

 

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La dévoration de Nicolas d’Estienne d’Orves

Estienne d'Orves - La DévorationJ’ai découvert Nicolas d’Estienne d’Orves grâce à son dernier roman, Les Fidélités successives, que j’avais pris un plaisir fou à lire et à chroniquer. Aussi, j’étais contente de voir débarquer son dernier opus, La Dévoration. Mon libraire m’avait prévenu : « Ça risque d’être un peu sanguinolent. L’auteur dit que c’est son livre le plus intime. »

Le plus intime? Super! Je prends… et je reste sur ma faim!

La Dévoration, c’est trois histoires en un roman. Il y a d’abord l’auteur prolifique, prénommé Nicolas, reconnu pour ses ouvrages violents à ne pas mettre entre toutes les mains. Il y a ensuite la description d’une lignée de bourreaux, la famille Rogis, depuis le Moyen Age jusqu’à aujourd’hui. Et il y a enfin l’histoire de Morimoto, le Japonais cannibale qui avait découpé et mangé sa petite copine de l’époque. (Toute ressemblance avec Issei Sagawa n’est que pure non-fiction).

J’ai trouvé l’intrigue mince, très mince et on voit venir le lien entre ces trois histoires comme le nez au milieu de la figure. Quant à la fin, je ne préfère même pas vous en parler… J’ai zappé les vingt pages racontant comment découper un cadavre (Nombreux détails m’ont soulevé le cœur : vous saviez, vous, que quand on découpe une cuisse humaine, la chair ressemble à des petits grains de maïs blanchâtres? Et que pour sodomiser quelqu’un, il vaut mieux le faire quand il est encore en vie, sinon les fluides refroidissent et ça pénètre moins facilement?) Ces scènes sont d’une crudité extrême, tout comme les scènes de sexe. Ça découpe la chair, ça bouffe des fesses, ça arrache des lambeaux de peau alors que la victime est encore en vie, ça tord les boyaux dans tous les sens.

L’auteur a pris un malin plaisir à faire de son personnage, un des êtres les plus fêlés qui soit. Petites natures, s’abstenir (déjà que je ne me range pas forcément dans cette catégorie…) Lisez plutôt Les fidélités successives, un grand roman!

La Dévoration de Nicolas d’Estienne d’Orves
Éditions Albin Michel, 2014
9782226258281
330p., 20€

Un article de Clarice Darling.


L’odeur des planches de Samira Sedira


Chouette! Un livre sur le théâtre!

l'odeur des planchesEn fait, pas du tout. Ou si peu. Cet ouvrage, c’est un peu une claque à toutes les idées reçues sur le métier de comédien, d’artiste en général. Samira Sedira est comédienne. Elle joue sur les plus grandes scènes, du théâtre de la Colline au TNP de Villeurbanne, de la France à l’étranger. Elle vivait, mangeait, respirait théâtre, son corps et son esprit violemment et résolument tournés vers cette vie. Et puis un jour… Plus de contrat. Elle a beau démarcher, passer des castings, plus rien. Pour ne pas être un poids financier pour son conjoint et pour ne pas rester inactive, elle décide de trouver un petit travail. Temporaire. Ce sera le ménage chez les particuliers. 

Samira Sedira nous livre un témoignage ultra-poignant, mêlant deux récits. Sa vie, ses conditions d’employée de maison et la dégradation de sa propre estime, condamnée qu’elle est à faire des ménages et récurer les toilettes des autres pour quelques euros. L’autre récit concerne ses parents, principalement sa mère. La vie en Algérie, le départ forcé pour la France, la vie dans une cité. Des vies sacrifiées pour le bonheur de leur enfant unique. L’ambition affichée de Samira de faire mieux que ses parents pour au final, se retrouver au même niveau, si ce n’est pire. 

L’auteur a écrit des chapitres courts, percutants, tout comme le style employé, sans concession. Un premier roman fort, qui nous donne envie de voir Samira très prochainement sur les planches. Courage!

L’odeur des planches de Samira Serida
Editions du Rouergue
9782812604898
135p., 16€

Un article de Clarice Darling


Le roi n’a pas sommeil de Cécile Coulon

Ainsi donc, Cécile Coulon, 21 ans seulement, a déjà publié deux romans et nous livre son troisième opus? Qu’à cela ne tienne. Ouvrons l’opus. 

Verdict : Cécile Coulon a une vraie plume. C’est beau, c’est bien écrit. On sent toute la littérature américaine qui l’influence dans son écriture (cela m’a fait immédiatement penser à Donna Tartt et Le petit copain ou Richard Russo par exemple.) La jeune auteur possède une écriture enlevée, précieuse sans chichi, qui dépeint sans détour l’Amérique profonde, son ciel lourd et pesant, ses personnages vivants et pourtant, presque déjà morts. Vraiment, Cécile Coulon écrit formidablement bien. 

Mais… si la forme est très réussie, le fond l’est moins. J’avoue ne pas avoir compris l’intérêt de cet ouvrage. Cela se lit très bien, mais il manque le quelque chose, qui aurait pu faire de ce roman, un livre très réussi. En refermant ce bouquin, je me suis dit : « Mouais… bof… »

Thomas Hogan est un petit garçon timide qui se renfermera sur lui même au lendemain du décès de son père. A un moment donné dans le roman, son destin bascule… sauf qu’encore maintenant, je ne sais toujours pas lequel… Le décès de son père? La trahison de son ex-meilleur ami? Franchement, on ne sait pas trop et ça n’aide pas à apprécier l’ouvrage à sa juste valeur. 

C’est vraiment dommage, mais je reste persuadée qu’un bel avenir littéraire s’offre à la jeune écrivain! Same player try again…

PS : Cher stagiaire des éditions Vivane Hamy, serait-il possible de dire à vos supérieurs d’arrêter de vous faire écrire de telles quatrièmes de couverture? C’est épuisant, pour vous comme pour le lecteur. Exemple : « La sobriété du style de Cécile Coulon – où explosent soudain les métaphores – magnifie l’âpreté des jours, communique une sensation de paix, de beauté indomptable, d’indicible mélancolie. »
Vraiment… Faut arrêter. Merci

Le roi n’a pas sommeil de Cécile Coulon
Editions Viviane Hamy
9782878585094
142 p., 17€

Un article signé Clarice Darling.