Quelques romans pour les petits (2)
Signé Bookfalo Kill
Toujours en panne d’inspiration pour vos enfants ? Voici trois nouvelles chroniques de romans à destination de lecteurs un peu plus grands (8-11 ans).
Le Principal problème du prince Prudent, de Christian Oster, illustrations d’Adrien Albert
Éditions Ecole des Loisirs, coll. Mouche, 2014
ISBN 978-2-211-21671-5
51 p., 7,50€
Le prince Prudent, le bien nommé, se méfie de tout, y compris des jeunes filles que ses parents lui présentent afin qu’il se marie. Malheureusement, aucune n’est assez prudente à ses yeux. Jusqu’au jour où une certaine princesse Prudence se présente au château. Avec un prénom pareil, ils ne peuvent que s’entendre à merveille ! Sauf que Prudence est tout sauf prudente… Alors, lorsqu’un géant l’enlève sous ses yeux, le prince Prudent n’écoute prudemment que son courage et se lance prudemment à la poursuite du ravisseur.
Mon avis : avec son prince trouillard, ainsi que son écriture drôle et gentiment ironique, Christian Oster signe un joli petit bijou d’humour ! Un petit roman d’aventure et d’amour pas nunuche pour un sou, à partir de 7-8 ans.
Le Club de la Pluie au pensionnat des mystères, de Malika Ferdjoukh
Éditions École des Loisirs, coll. Neuf, 2014
ISBN 978-2-211-21790-3
82 p., 8,50€
En entrant au pensionnat des Roches-Noires, à Saint-Malo, Rose ne s’attend pas à vivre de folles aventures. Et pourtant, avec ses nouveaux amis Nadget, la jolie coquette à la tête bien faite, et Ambroise, le fils du concierge toujours suivi par son chien Clipper, elle va devoir résoudre de drôles de mystères.
Qui est enfermé dans la haute tour de l’internat, au point de devoir envoyer des messages d’appels à l’aide par la fenêtre ? Et qui est coupable de tous ces vols à Saint-Malo ? Ensemble, les trois amis mènent l’enquête.
Mon avis : deux enquêtes, L’Énigme de la tour et Le Voleur de Saint-Malo, sont réunies dans ce volume. Deux histoires brèves, dynamiques et pleins d’humour, dont les petits héros, hyper attachants, font preuve de débrouillardise et de solidarité. Un petit côté Club des Cinq moderne, pour les amateurs de roman policier en culottes courtes, à partir de 9-10 ans.
Martin, gaffeur tout-terrain, de Sarah Turoche-Dromery
Éditions Thierry Magnier, 2014
ISBN 978-2-36474-445-5
96 p., 6,90€
Martin est une catastrophe ambulante. Tout ce qu’il fait, même lorsqu’il est bien intentionné, se transforme immanquablement en gaffe ou en bêtise. Alors, quand il doit prendre l’avion avec son frère Sam pour rejoindre leurs parents en Italie et assister au mariage de leur cousin Angelo, c’est une véritable tornade d’ennuis qui s’abat sur les frangins…
Mon avis : sous ses côtés amusants, ce petit roman rythmé raconte de jolies choses sur la différence, la difficulté d’être frères, ou l’adolescence dans toute sa splendide complexité. Mais c’est surtout une succession d’aventures plus folles et rocambolesques les unes que les autres, qui réjouiront les jeunes lecteurs, à partir de 10 ans.
Le garçon incassable, de Florence Seyvos
Signé Bookfalo Kill
Une fois n’est pas coutume, je ne vais pas commencer cette chronique par un résumé du roman. Essayer de le faire reviendrait à lui faire perdre de sa substance et de sa singularité, et ce serait franchement dommage, car ce Garçon incassable, petite merveille d’émotion subtile, mérite d’être perçu dans toute sa singulière lumière.
Le nouveau livre de Florence Seyvos (scénariste des films de Noémie Lvovsky, et notamment du dernier, le pétillant Camille redouble) s’ouvre à Los Angeles, alors que la narratrice suit les traces de Buster Keaton. Le destin et la personnalité extrêmement particulière du Mécano de la Général lui font penser à son demi-frère Henri, handicapé physique et mental, dont la fragilité devient une source d’apprentissage de la différence.
De ce point de départ, elle esquisse les portraits croisés de deux enfants atypiques, inadaptés au monde. Les récits se répondent et rebondissent l’un sur l’autre sans chercher à se croiser, même si, parfois, des échos troublants se font entendre – comme, par exemple, la fascination des deux personnages pour les trains.
J’ignore si ce roman est autobiographique, mais peu importe. Quoi qu’il en soit, Florence Seyvos parvient à donner à sa narratrice pourtant réservée une sincérité de tous les instants, qui nous rend ses deux anti-héros aussi attachants et bouleversants l’un que l’autre ; chacun à sa manière, le garçon incassable et le garçon fracassé, aussi perdus en apparence et pourtant plus vrais, plus forts, plus rayonnants que bien des gens.
Le diction affirme que le diable est dans les détails ; chez cette romancière rare, c’est plutôt le talent. Au fil des souvenirs qui s’esquissent, son art de la saynète brouille parfois la chronologie des deux récits pour mieux en saisir l’essentiel, pour traquer l’émotion au plus juste, toujours d’une manière délicate et mesurée, à l’image de son écriture qui jamais ne cherche à appuyer, à surligner. Florence Seyvos privilégie la simplicité apparente d’une langue discrète, sans esbroufe ni effets de manche, et c’est magnifique.
Bref, un vrai coup de cœur pour ce Garçon incassable d’une générosité irradiante, dont certaines scènes me suivront longtemps (le Titanic…), et qui me donne le sentiment précieux d’en sortir un peu plus riche. Ne passez pas à côté.
Le Garçon incassable, de Florence Seyvos
Éditions de l’Olivier, 2013
ISBN 978-2-87929-785-9
173 p., 16€