Les quatre fils du Docteur March, de Brigitte Aubert
SI VOUS AVEZ AIME… Qui ?, de Jacques Expert
VOUS AIMEREZ PEUT-ÊTRE AUSSI :
Les quatre fils du Docteur March, de Brigitte Aubert
Éditions Points, 1992
ISBN 978-2-0203-6715-8
241 p., 6€
En s’amusant dans Qui ? à livrer au fil du récit les confidences anonymes du meurtrier, Jacques Expert n’a évidemment rien inventé, de nombreux romanciers usent régulièrement de cet artifice. Dans le même style Cluedo, j’ai repensé à un roman de Brigitte Aubert que j’avais beaucoup aimé, Les quatre fils du Docteur March (oui oui, vous avez bien lu le titre), dont je me souviens comme étant beaucoup plus réussi que Qui ?.
En voici l’intrigue : Jeanie est la bonne du docteur March, médecin respectable et père de quadruplés, quatre garçons de dix-huit ans aussi rigoureusement identiques que brillants. Un jour, Jeanie découvre par hasard un journal intime, dans lequel l’un des garçons (oui, mais qui ?) se révèle sous les traits d’un meurtrier sadique de la plus belle espèce.
Terrifiée mais ne pouvant prévenir la police, ayant elle-même des choses à se reprocher, Jeanie entreprend d’identifier seule le coupable, en livrant ses craintes et ses réflexions dans son propre journal. Problème : le coupable comprend que quelqu’un lit ses écrits en cachette. Commence alors entre les deux un terrifiant jeu du chat et de la souris…
Ramassé sur 240 pages (format poche), le roman de Brigitte Aubert a la qualité de sa concision : il reste focalisé sur son huis clos mental et ne se perd dans aucun chemin de traverse artificiel. Alternant le journal intime de l’assassin et celui de Jeanie, sous forme de paragraphes courts, le récit, très dynamique, nous plonge immédiatement dans le vif du sujet. La montée en tension est implacable jusqu’à la fin et le suspense, d’une cruauté jubilatoire.
Brigitte Aubert s’amuse également avec les niveaux de langue, faisant de Jeanie une fille fruste et limitée, mais obstinée, tandis que l’assassin change volontiers de registre pour brouiller les pistes.
Quant à la révélation finale, si l’on peut reprocher à Brigitte Aubert d’avoir dû employer la voix d’un tiers extérieur à l’intrigue pour la dévoiler (ce qui crée un effet étrange après le match de ping-pong serré qu’on a suivi depuis le début), elle est tirée par les cheveux juste ce qu’il faut pour ne pas frustrer le lecteur – du moins ne l’ai-je pas été, alors que j’ai été surpris par la vérité. D’après ce que j’ai pu lire sur Internet, ce n’est pas le cas de tout le monde, mais c’est le jeu de ce genre de livre.
Pour ma part, je considère Les quatre fils du Docteur March comme un très bon duel épistolaire (une originalité qui mérite le détour), réjouissant et prenant, facile à aborder, que je recommande aux amateurs de polars ludiques et décalés.
Signé Bookfalo Kill